12. Evanouissement par Multi-Trajets¶

Dans ce chapitre, nous prĂ©sentons les trajets multiples, un phĂ©nomĂšne de propagation qui fait que les signaux atteignent le rĂ©cepteur par deux chemins ou plus, ce qui est le cas dans les systĂšmes sans fil du monde rĂ©el. Jusqu’à prĂ©sent, nous n’avons abordĂ© que le “canal AWGN”, c’est-Ă -dire un modĂšle de canal sans fil oĂč le signal est simplement ajoutĂ© au bruit, qui ne s’applique rĂ©ellement qu’aux signaux transmis par cĂąble et Ă  certains systĂšmes de communication par satellite.

Multi-Trajets¶

Tous les canaux sans fil rĂ©alistes comportent de nombreux “rĂ©flecteurs”, Ă©tant donnĂ© que les signaux RF rebondissent. Tout objet situĂ© entre ou prĂšs de l’émetteur (Tx) ou du rĂ©cepteur (Rx) peut crĂ©er des chemins supplĂ©mentaires que le signal emprunte. Chaque chemin subit un dĂ©phasage (retard) et une attĂ©nuation (rĂ©duction d’amplitude) diffĂ©rents. Au niveau du rĂ©cepteur, tous les chemins s’additionnent. Ils peuvent s’additionner de maniĂšre constructive, destructive ou un mĂ©lange des deux. Nous appelons ce concept de trajets multiples du signal “multi-trajets”. Il y a le chemin en visibilitĂ© directe (LOS pour line of sight en anglais), puis tous les autres chemins. Dans l’exemple ci-dessous, nous montrons le chemin LOS et un seul chemin non-LOS :

../_images/multipath.svg

Des interfĂ©rences destructrices peuvent se produire si vous n’avez pas de chance avec la façon dont les chemins s’additionnent. Prenons l’exemple ci-dessus avec seulement deux trajets. Selon la frĂ©quence et la distance exacte des trajets, les deux trajets peuvent ĂȘtre reçus avec un dĂ©phasage de 180 degrĂ©s et Ă  peu prĂšs la mĂȘme amplitude, ce qui les annule l’un par rapport Ă  l’autre (voir ci-dessous). Vous avez peut-ĂȘtre appris l’interfĂ©rence constructive et destructive en cours de physique. Dans les systĂšmes sans fil, lorsque les trajets se combinent de maniĂšre destructrice, nous appelons cette interfĂ©rence â€œĂ©vanouissement profond” car notre signal disparaĂźt briĂšvement.

../_images/destructive_interference.svg

Les trajets peuvent Ă©galement s’additionner de maniĂšre constructive, entraĂźnant la rĂ©ception d’un signal fort. Chaque chemin a un dĂ©phasage et une amplitude diffĂ©rents, que nous pouvons visualiser sur un graphique dans le domaine temporel appelĂ© “profil de retard de puissance”:

../_images/multipath2.svg

Le premier chemin, le plus proche de l’axe des y, sera toujours le chemin LOS (en supposant qu’il y en ait un) car aucun autre chemin ne peut atteindre le rĂ©cepteur plus rapidement que le chemin LOS. En gĂ©nĂ©ral, l’amplitude diminue lorsque le dĂ©lai augmente, car un chemin qui a mis plus de temps Ă  arriver au rĂ©cepteur aura voyagĂ© plus loin.

Evanouissement¶

Ce qui a tendance Ă  se produire, c’est un mĂ©lange d’interfĂ©rences constructives et destructives, et cela change au fil du temps lorsque la Rx, la Tx ou l’environnement se dĂ©place/change. Nous utilisons le terme “evanouissement” pour dĂ©signer les effets d’un canal Ă  trajets multiples changeant au fil du temps. C’est pourquoi nous parlons souvent dâ€˜â€œĂ©vanouissement par multi-trajets”; il s’agit en fait de la combinaison d’une interfĂ©rence constructive/destructrice et d’un environnement changeant. Le rĂ©sultat est un rapport signal/bruit qui varie dans le temps; les changements sont gĂ©nĂ©ralement de l’ordre de la milliseconde Ă  la microseconde, selon la vitesse de dĂ©placement de la Tx/Rx. Vous trouverez ci-dessous un graphique du rapport signal/bruit en fonction du temps en millisecondes qui illustre l’évanouissement par multi-trajets.

../_images/multipath_fading.png

Il existe deux types d’évanouissement du point de vue du domaine temporel :

  • Évanouissement lent: Le canal ne change pas pendant la durĂ©e d’un paquet de donnĂ©es. C’est-Ă -dire qu’un zĂ©ro pendant un Ă©vanouissement lent effacera tout le paquet.
  • L’évanouissement rapide: le canal change trĂšs rapidement par rapport Ă  la longueur d’un paquet. La correction d’erreur, combinĂ©e Ă  l’entrelacement, peut combattre l’évanouissement rapide.

Il existe Ă©galement deux types d’évanouissement du point de vue du domaine frĂ©quentiel :

Evanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence : L’interfĂ©rence constructive/destructive change dans la gamme de frĂ©quences du signal. Lorsque nous avons un signal Ă  large bande, nous couvrons une large gamme de frĂ©quences. Rappelez-vous que la longueur d’onde dĂ©termine si elle est constructive ou destructive. Si notre signal couvre une large gamme de frĂ©quences, il couvre Ă©galement une large gamme de longueurs d’onde (puisque la longueur d’onde est l’inverse de la frĂ©quence). Par consĂ©quent, nous pouvons obtenir diffĂ©rentes qualitĂ©s de canal dans diffĂ©rentes parties de notre signal (dans le domaine frĂ©quentiel). D’oĂč le nom d’évanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence.

Evanouissement plat : se produit lorsque la largeur de bande du signal est suffisamment Ă©troite pour que toutes les frĂ©quences subissent Ă  peu prĂšs le mĂȘme effet du canal. S’il y a un Ă©vanouissement profond, l’ensemble du signal disparaĂźt (pendant la durĂ©e de l’évanouissement).

Dans la figure ci-dessous, la forme rouge montre notre signal dans le domaine frĂ©quentiel, et la ligne courbe noire montre l’état actuel du canal sur la frĂ©quence. Comme le signal le plus Ă©troit connaĂźt les mĂȘmes effets de canal sur l’ensemble du signal, il subit un Ă©vanouissement plat. Le signal plus large subit un Ă©vanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence.

../_images/flat_vs_freq_selective.png

Voici un exemple d’un signal de 16 MHz de large qui Ă©met en continu. Il y a plusieurs moments au milieu oĂč il manque une partie du signal. Cet exemple illustre l’évanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence, qui provoque des trous dans le signal qui effacent certaines frĂ©quences mais pas d’autres.

../_images/fading_example.jpg

Simulation de l’évanouissement de Rayleigh¶

L’évanouissement de Rayleigh est utilisĂ© pour modĂ©liser l’évanouissement dans le temps, lorsqu’il n’y a pas de trajet LOS significatif. Lorsqu’il y a un chemin LOS dominant, le modĂšle d’évanouissement de Rice devient plus appropriĂ©, mais nous nous concentrerons sur Rayleigh. Notez que les modĂšles de Rayleigh et de Rice ne tiennent pas compte de l’évanouissement sur le trajet principal entre l’émetteur et le rĂ©cepteur (telle que l’attĂ©nuation sur le trajet calculĂ©e dans le cadre d’un bilan de liaison), ni de l’ombrage (shadowing en anglais) causĂ© par de grands objets. Leur rĂŽle est de modĂ©liser l’évanouissement par trajets multiples qui se produit au fil du temps, en raison du mouvement et des diffuseurs (scatterers en anglais) dans l’environnement.

De nombreuses thĂ©ories sont issues du modĂšle d’évanouissement de Rayleigh, telles que des expressions pour le durĂ©e moyenne du dĂ©passement de l’envelope du signal d’un certain seuil et la durĂ©e moyenne d’évanouissement. Mais le modĂšle d’évanouissement de Rayleigh ne nous dit pas directement comment simuler un canal Ă  l’aide de ce modĂšle. Pour gĂ©nĂ©rer des Ă©vanouissements de Rayleigh en simulation, nous devons utiliser l’une des nombreuses mĂ©thodes publiĂ©es. Dans l’exemple Python suivant, nous utiliserons la mĂ©thode “somme-de-sinusoides” de Clarke.

Pour gĂ©nĂ©rer un canal d’évanouissement de Rayleigh en Python, nous devons d’abord spĂ©cifier le dĂ©calage Doppler maximum, en Hz, qui est basĂ© sur la vitesse de dĂ©placement de l’émetteur et/ou du rĂ©cepteur, notĂ© :math:\Delta v. Lorsque la vitesse est faible par rapport Ă  la vitesse de la lumiĂšre, ce qui sera toujours le cas dans les communications sans fil, le dĂ©calage Doppler peut ĂȘtre calculĂ© comme suit:

f_D = \frac{\Delta v f_c}{c}

oĂč c est la vitesse de la lumiĂšre, environ 3e8 m/s, et f_c est la frĂ©quence porteuse sur laquelle la transmission est effectuĂ©e.

Nous choisissons Ă©galement le nombre de sinusoĂŻdes Ă  simuler, et il n’y a pas de bonne rĂ©ponse car elle est basĂ©e sur le nombre de diffuseurs dans l’environnement, que nous ne connaissons jamais rĂ©ellement. Dans le cadre des calculs, nous supposons que la phase du signal reçu de chaque chemin est uniformĂ©ment alĂ©atoire entre 0 et 2\pi. Le code suivant simule un canal Ă  Ă©vanouissement de Rayleigh en utilisant la mĂ©thode de Clarke :

import numpy as np
import matplotlib.pyplot as plt

# ParamÚtres de simulation, n'hésitez pas à les modifier.
v_mph = 60 # la vitesse de TX ou RX, en miles par heure
center_freq = 200e6 # Fréquence de la porteuse RF en Hz
Fs = 1e5 # fréquence d'échantillonnage de la simulation
N = 100 # nombre de sinusoĂŻdes Ă  additionner

v = v_mph * 0.44704 # convertir en m/s
fd = v*center_freq/3e8 # max du décallage Doppler
print("max Doppler shift:", fd)
t = np.arange(0, 1, 1/Fs) # verteur de temps. (début, fin, pas)
x = np.zeros(len(t))
y = np.zeros(len(t))
for i in range(N):
    alpha = (np.random.rand() - 0.5) * 2 * np.pi
    phi = (np.random.rand() - 0.5) * 2 * np.pi
    x = x + np.random.randn() * np.cos(2 * np.pi * fd * t * np.cos(alpha) + phi)
    y = y + np.random.randn() * np.sin(2 * np.pi * fd * t * np.cos(alpha) + phi)

# z est le coefficient complexe représentant le canal, vous pouvez penser à cela comme un déphasage et attenuation d'amplitude
z = (1/np.sqrt(N)) * (x + 1j*y) # c'est ce que vous utiliserez réellement lorsque vous simulerez le canal
z_mag = np.abs(z) # prendre la magnitude pour les besoins de la figure
z_mag_dB = 10*np.log10(z_mag) # convertir en dB

# Plot fading over time
plt.plot(t, z_mag_dB)
plt.plot([0, 1], [0, 0], ':r') # 0 dB
plt.legend(['Evanouissement de Rayleigh', 'Pas d Ă©vanouissement'])
plt.axis([0, 1, -15, 5])
plt.show()

Si vous avez l’intention d’utiliser ce modĂšle de canal dans le cadre d’une simulation plus large, il vous suffit de multiplier le signal reçu par le nombre complexe z, reprĂ©sentant l’évanouissement plat. La valeur z est alors mise Ă  jour Ă  chaque pas de temps. Cela signifie que toutes les composantes de frĂ©quence du signal sont soumises au mĂȘme canal Ă  un moment donnĂ©. Vous ne simulez donc pas un Ă©vanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence, qui nĂ©cessite une rĂ©ponse impulsionnelle du canal Ă  plusieurs taps, que nous n’aborderons pas dans ce chapitre. Si nous regardons l’amplitude de z, nous pouvons voir l’évanouissement de Rayleigh dans le temps :

../_images/rayleigh.svg

Observez les Ă©vanouissements profonds qui se produisent briĂšvement, ainsi que la petite fraction de temps oĂč le canal est de meilleur qualitĂ© que s’il n’y avait pas d’évanouissement du tout.

AttĂ©nuation de l’Evanouissement Multi-Trajets¶

Dans les communications modernes, nous avons développé des moyens de lutter contre les évanouissements par trajets multiples.

CDMA¶

La 3G utilise une technologie appelĂ©e accĂšs multiple par rĂ©partition de code (CDMA). Avec la CDMA, vous prenez un signal Ă  bande Ă©troite et vous l’étalez sur une large bande passante avant de le transmettre (en utilisant une technique d’étalement du spectre appelĂ©e DSSS). Dans le cas d’un Ă©vanouissement sĂ©lectif en frĂ©quence, il est peu probable que toutes les frĂ©quences se trouvent dans un Ă©vanouissement profond au mĂȘme moment. Au niveau du rĂ©cepteur, l’étalement est inversĂ©, et ce processus de dĂ©sĂ©talement attĂ©nue grandement l’effet de l’évanouissement profonde.

../_images/cdma.png

OFDM¶

La 4G, le WiFi et de nombreuses autres technologies utilisent un schĂ©ma appelĂ© multiplexage par rĂ©partition orthogonale de la frĂ©quence (OFDM). L’OFDM utilise ce que l’on appelle des sous-porteuses, qui divisent le signal dans le domaine des frĂ©quences en un ensemble de signaux Ă©troits et rapprochĂ©s. Pour lutter contre les Ă©vanouissements par trajets multiples, nous pouvons Ă©viter d’assigner des donnĂ©es aux sous-porteuses qui sont dans un Ă©vanouissement profond, bien que cela nĂ©cessite que le rĂ©cĂ©pteur renvoie les informations du canal Ă  l’émetteur assez rapidement. Nous pouvons Ă©galement affecter des schĂ©mas de modulation d’ordre Ă©levĂ© aux sous-porteuses dont le canal est de bonne qualitĂ© afin de maximiser notre dĂ©bit de donnĂ©es global.